A quand? Dit Dature.

Le jeune disciple contemplait la crypte de Kardorim. Son premier vrai défi se tenait face à lui, avec pour récompense le premier pas vers la gloire. Mais, seul, il ne serait pas de taille. Il demanda à la volée qui voulait se joindre à lui et les mains de quelques néophytes se levèrent. Parmi eux, son futur compagnon d'arme, avec qui il allait partager de nombreuses aventures et fou rires, même s'il ne le savait pas encore.

Tous ensemble, ils n'eurent aucun mal à se défaire du méchant squelette. Certains prouvèrent déjà avoir une destinée plus prometteuse que d'autres s'ils continuaient sur cette voie. L'un retint particulièrement son attention par sa personnalité similaire à la sienne.

Le jeune disciple tenta de garder contact avec eux pour les jours de ses futurs combats où il aurait besoin d'aide. L'un d'eux répondit le plus à ses appels - je vous laisse deviner lequel - et une amitié fut créée entre les deux disciples qui, dorénavant, avancèrent ensemble.


Ils avaient vaincu de nombreux donjons et ne pouvaient plus être considérés comme des apprentis. Ils se heurtaient néanmoins à un obstacle : un gardien sur l'île de glace qui finit par être trop puissant, leur faisant mordre en boucle la poussière. Leurs chevaliers ne suffisaient plus à leur garantir la victoire.

Ils leur fallait de nouveaux compagnons d'arme.

Alors l'optique d'une guilde sembla nécessaire. Après des échecs ils finirent par trouver celle qui leur convenait, une avec des aventuriers qui leur ressemblaient. Et, tous ensemble, ils vainquirent un à un les gardiens de d'île au froid mordant.

Ce n'étaient pas des victoires faciles, souvent ils leur fallait essayer et réessayer sans garantie de victoire. Mais petit à petit, au fil de leurs tentatives, ils avançaient un peu plus et découvraient une faiblesse dans leurs ennemis. Une faille qui, une fois exploitée, leur permettait de triompher. Leurs talents étaient variés, chacun avait son propre atout qui leur permettaient de se compléter, puis de gagner. Leur point commun était leur volonté, et ils parvinrent à maintenir leur groupe même dans les moments les plus difficiles, et à obtenir ensemble le Dofus des glaces tant convoité.


Un changement dans les plans avait permis d'ouvrir les dimensions des dieux. Dans ces dimensions se trouvaient des épreuves encore plus difficiles que celles que leur avaient imposées le Comte et ses comparses. Leurs nouveaux ennemis étaient des créatures encore plus féroces que celles du monde des Douze. Et leurs maîtres, bénis par les dieux eux-mêmes, étaient beaucoup trop forts pour leur groupe.

Échecs après échecs, sans une seule lueur d'espoir qui pourrait mener à leur réussite, ils finirent par abandonner la gloire ultime. Ils avaient déjà réussi à aller loin, plus loin que la plupart des autres aventuriers. Peut être pourraient-ils retenter plus tard, mais là ils n'étaient pas prêts.

Pas ensemble en tout cas.

Oui, pas ensemble. Il avait réussi à prouver sa valeur et sa motivation. Il était un favori des dieux qui avait relevé leurs nombreux défis et avait su mener son groupe à la victoire. Il méritait bien de continuer son rêve d'être le plus glorieux des aventuriers. Ils n'étaient pas aussi motivés que lui, et ainsi ils le retenait.

Le joueur qu'il était décida de se détacher de ses compagnons. Il serait un unique esprit qui contrôlerait huit corps.


Le Chaloeil tomba sous ses coups.

Après des mois à s'entrainer et à entasser une fortune pour devenir plus fort, sa détermination avait fini par payer.

Il avait enfin atteint la gloire dont il rêvait depuis toujours.

Alors... Pourquoi ?

Pourquoi se sentait-il si triste et si vide ? Pourquoi n'était-il pas heureux comme il avait imaginé ce moment autrefois ? Quand il réussissait, ce n'était pas comme avant. Pourtant tout était plus facile et rapide. Grâce à lui seul. Qu'est-ce qu'il manquait ? Pourquoi ne pouvait-il pas être heureux de sa réussite ? Pourquoi ses émotions se manifestaient sous la forme de larmes et pas d'éclats de rire ? Ils n'étaient pas là avec lui. La nostalgie de ces moments le rattrapait. C'était la solitude. Et ses succès lui paraissaient fades sans personne avec qui les partager.

Alors il prit sa décision. Son esprit abandonna les corps. Il partit habiter celui d'un nouveau disciple. Un qui avait tout à redécouvrir. Un qui, seul, aurait besoin de compagnie pour relever à nouveau tous ces défis. Pour que ceux-ci soient plus satisfaisants. Pour que ceux-ci puissent être partager. Pour que ceux-ci soient accompagnés de souvenirs heureux.

Il partit trouver de nouveaux compagnons.

Et c'est pourquoi Vestige fut créée.

Tandis que la nuit tombait sur les dunes de Saharach et que le froid prenait la place de la chaleur assommante de la journée, la famille Piko, en ce soir du 24 Decendre 686, fêtait le réveillon de Nowel. Dans leur antre chaleureuse, pendant que maman et papa Piko roulaient sous la table, papi Piko souhaiterait se balancer tranquillement sur sa chaise en somnolant, mais son plan était compromis par les trois garnement de la famille qui couraient en hurlant autour de lui.

- Papiko ! Papiko ! Raconte nous une histoire !  

- Calmez-vous ou les vestigiens viendront dévorer vos âmes ! s’exclama papiko, exaspéré.

- C’est quoi un végélien ?

- Les vestigiens sont les créatures les plus maléfiques que j’ai jamais rencontré, il marqua une pause théâtrale. C’était en Novamaire 646, à l’époque j’étais craint et redouté, connu comme le plus terrible des bandits de Saharach, les gens me nommaient… El Piko !
Au sommet de ma gloire, j’avais aménagé un donjon dont j’étais le gardien afin d’attirer à la mort de naïfs aventuriers. Tout se passait pour le mieux, ma réputation grimpait en flèche, j’étais sur le point de faire fortune, puis ils sont arrivés…


Devant mon donjon, au sommet d’une dune, à contrejour, les cheveux dans le vent et le regard tourné vers l’horizon, quatre braves guerriers en quête de gloire ! Je réveillais joyeusement mes larbins pour qu’ils se préparent au combat, nous avions des clients ! J’observais les nouveaux venus s’approcher de ma grotte avec impatience tout en enfilant mon sombrero et mon poncho,, encore une bonne brochette de vainqueurs à l’air benêt venue se casser les dents face à mes sbires !  Le temps qu’ils franchissent les quatre premières salles, je m’installais confortablement, adossé à un rocher, mon sombrero couvrant mon visage, et j’attendis, une heure, deux heure… le temps passa lentement, si lentement que je finis par m’assoupir. A mon réveil, c’était le petit matin, j’avais dormi toute la nuit. Je me redressais, tout ankylosé, puis constatais avec stupeur que les énergumènes n’en avait toujours pas terminé avec la première salle ! Tous mes sbires fuirent le donjon, à bout de nerfs, et le groupe de mystérieux aventuriers à l’étendard beige particulièrement laid se dandinait en chantant, très fier d’avoir gagné par forfait.

Il vinrent à moi, très confiants, j’étais impatient de remettre ces olibrius à leur place en leur infligeant une bonne déculottée, je n’avais pas besoin de mes hommes de main pour cela ! Tandis que je mettais en position pour le combat qui s’annonçait, le Iop de leur groupe était en train de régler un minuteur, remarquant mon air intrigué, il expliqua : << C’est un cadeau de feu notre meneur Iswatch, un puissant Xelor, c’est pour me rappeler quand c’est qu’est-ce que je dois lancer ma colère de Iop autrement j’oublie toujours ! Au bout d’un moment ça fait “ting !” et alors je fais “paf ! “ et là tout de suite l’ennemi baisse d’un thon ! >>
Ne saisissant pas le rapport entre un minuteur et un thon, je haussais les épaules puis, las d’attendre, je fonçais droit sur eux. Le combat débuta enfin, le Feca s’interposa bravement et arrêta ma charge avec une barricade, le Iop me mit alors la pression pour laisser le temps à l’Eniripsa d’invoquer un lapino et à l’Eliotrope de préparer ses portails. Encore loin de me douter de leur véritable potentiel, je me dis que finalement ils n’étaient pas si mauvais. Le Iop, dans le feu de l’action, réclama un mot stimulant, mais l’Eniripsa préféra lancer le sort sur son lapino. Une dispute éclata alors dans le groupe.

- Abruti, pourquoi tu le fais toujours sur le lapino ? beugla le Iop à l’attention du soigneur.

- Eh, tu parle pas pas comme ça à Koasu fils d’ouginak ! s’interposa le Feca.

- Surveille ton langage quand tu parle à Jartemis, mon pote ! hurla le dénommé Koasu.

- C’est pas ton pote, mec ! s’en mêla l’Eliotrope.

- J’suis pas ton mec, mon gars !

- C’est pas ton gars, mon pote !

Eberlué, je regardais la dispute prendre toujours plus d’ampleur, à tel point qu’ils commencèrent à se battre entre eux. Me sentant humilié au plus haut point d’être ainsi ignoré dans mon propre donjon, les larmes me montèrent aux yeux, c’en était trop !
Ca suffit ! Mais pourquoi vous me faites subir ça ? Vous voulez ruiner ma réputation ?  Vous avez fais un pari avec vos amis ? Qu’ai-je donc fait pour mériter ça ? Je suis juste un cactus qui essaie de gagner honnêtement sa vie !
Pleurant à chaudes larmes, le Feca s’approcha de moi pour me réconforter. Soudain un “Ting !” retentit, et le Iop Jartemis, tout excité, se jeta de tout son poids dans l’un des portails de l’Eliotrope en hurlant “PAF !” et sa terrible colère s’abattit sur moi depuis le portail qui avait été placé juste à côté de moi à mon insu, désintégrant mon sombrero et brisant mes épines. Malgré mon déshonneur ils ne s’arrêtèrent pas là, ils prirent soin de me dépouiller dans la joie et la bonne humeur.
Mais qui êtes-vous à la fin ? demandais-je dans un râle.
Tu ne le sais pas encore ? C’est pourtant évident ! Nous sommes Vestige, défenseurs de la veuve et de l’orfélin, mangeur d’enfants pas sages et dépouilleurs de cactus à l’occasion !
Sur ces mots ils me laissèrent seul avec mon désespoir.


Voilà les enfants, l’histoire de ma rencontre avec les vestigiens. Alors n’oubliez pas, si vous voyez un blason beige à plus laid qu’un derrière de porkass, fuyez à toutes jambes, car le pire fléau du monde des Douze est à vos trousse ! Mais… les enfants ? Où sont-ils passé ? Ah… ils m’ont encore laissé radoter tout seul...

8=========>